Risques pays et sectoriels : quels perspectives pour 2018 ?

Le 23 janvier dernier, la COFACE organisait son colloque annuel consacré aux risques pays et sectoriels dans le monde. Parmi les grandes tendances de l’économie mondiale pour l’année 2018 : une croissance mondiale considérablement accrue dans la plupart des régions du monde malgré des risques toujours présents, notamment en matière de contraintes de l’offre, de risques bancaires ou de risques politiques.

Un pic de croissance annoncé pour 2018

Alors que beaucoup craignaient une accélération des mesures protectionnistes ainsi que des retombées négatives des nombreuses élections et crises politiques survenues en 2017, le commerce mondial a fait un bond spectaculaire (4,4% de croissance en 2017 contre 1,5% en 2016). En fin d’année, seuls 13 pays se situaient en état de récession contre 26 en 2016, soit deux fois moins. Au final, qu’il s’agisse des mesures protectionnistes aux Etats-Unis, restées pour la plupart au stade d’annonces, des résultats des élections en France ou aux Pays-Bas, ou encore des crises allemande avec les difficultés de formation du gouvernement et catalane avec les velléités indépendantistes, le facteur politique n’a pas affecté le rebond de croissance en cours.

Les entreprises bénéficient en effet de nombreux facteurs favorables : politique monétaire particulièrement expansionniste se traduisant par une reprise du crédit au secteur privé, prix du pétrole relativement bas favorisant les marges des entreprises, consommation des ménages soutenue, remontée des cours de certaines matières premières.

Des évaluations pays en hausse

Certains pays ont particulièrement profité de ce rebond et voient leur évaluation s’améliorer, malgré des risques politiques toujours présents pour certains d’entre eux :

. Le Brésil (réévalué en risque B) profite ainsi, après deux ans de profonde récession, d’une croissance de 0,6% en glissement annuel, avec un bon niveau de consommation privée, une baisse du taux de chômage, un faible niveau d’inflation et un cycle d’assouplissement monétaire solide.

. La Grèce (B), après un accord trouvé avec les créanciers internationaux en juin 2017, profite, quant à elle, du retour de la confiance des ménages et des entreprises, d’une amélioration de la compétitivité des exportations de biens et services et d’un rebond du secteur touristique.

. Les Pays-Bas (A1) enregistrent, pour leur part, un taux de croissance supérieur à 2% avec une prévision de baisse record des défaillances d’entreprises pour 2018 (-10%).

. L’Ukraine (C) devrait, de même, continuer de voir sa croissance augmenter pour atteindre 3% en 2018 avec une stabilisation de la situation dans les provinces de l’est et de ses relations avec la Russie ainsi qu’une progression des réformes en cours sous pression du FMI.

. Le Kazakhstan (B) profite, quant à lui, du développement de sa production pétrolière et des investissements publics en lien avec le projet chinois de « nouvelle route de la soie ».

D’autres pays sont également concernés par ses évaluations positives, notamment la Corée du Sud (A2), l’Egypte (B), Taiwan (A2), Singapour (A2), Hong-Kong (A2), la Moldavie (C) ou la Géorgie (B).

Une embellie de l’économie confirmée en 2017 qui devrait se poursuivre sur la première partie de l’année 2018, puisque les prévisions de croissance sont de 3,2% au niveau mondial et 4,6% dans les pays émergents.

Mais des facteurs de risques toujours présents

Contraintes d’offre en Europe et Etats-Unis, risques bancaires en Chine, risques politiques pour certains pays…la croissance mondiale ne sera pas sans risque.

La COFACE identifie notamment un risque de contraintes d’offre à partir du second semestre 2018 pour les entreprises des pays avancés. En effet, certains pays européens comme l’Allemagne, mais aussi des pays d’Europe centrale ou alors les Etats-Unis observent des taux de chômage exceptionnellement bas (taux de chômage le plus bas en Allemagne depuis 37 ans) qui indiquent des risques de limitation de leur capacité de production. Ce problème d’offre est également partagé par la France où de nombreuses entreprises sont confrontées à une pénurie de main alors même que le niveau du chômage reste élevé. Résultat : la croissance devrait sinon ralentir, du moins stagner en 2018 sous l’effet de ces contraintes d’offre, puisque pressions salariales et pénuries de main d’œuvre limiteront les capacités de production des entreprises.

La COFACE signale également des difficultés à venir dues à la fragilité des entreprises chinoises. Surcapacités dans les secteurs de la métallurgie, de la chimie ou de la construction, augmentation de la dette des entreprises, notamment sous la forme de crédit bancaire ou de « shadow banking », augmentation du coût du travail pénalisant les entreprises du secteur textile notamment, rythme d’activité en baisse : tous ces facteurs conduisent à un risque bancaire accru, notamment au sein des petites et moyennes banques.

Enfin, des risques politiques sont également envisagés dans le contexte d’un calendrier électoral chargé en 2018. La COFACE indique en effet un niveau élevé de l’indice de troubles sociaux en Iran (71%), au Liban (65%), en Russie (64%), en Algérie, au Brésil et au Mexique (61%), ou encore au Moyen-Orient, notamment en Arabie Saoudite (65%). Les élections électorales dans plusieurs pays (Brésil, Mexique, Russie ou Egypte) seront notamment à suivre.

Les risques sectoriels à la loupe

Dans ce contexte global, certains secteurs d’activité profitent de la croissance et notamment de la bonne tenue de la consommation des ménages et des bonnes conditions de financement.

. Le secteur de la métallurgie est dans ce cadre particulièrement avantagé. Sous l’effet d’une remontée des cours des métaux, notamment due à la croissance du secteur de la construction et des infrastructures en Chine, ainsi que de la fermeture de plusieurs mines dans le monde, l’évaluation de certains pays comme l’Italie, l’Inde, la Turquie ou les Pays-Bas s’est nettement améliorée. La production mondiale devrait ainsi augmenter de 2% en 2018, la production chinoise (production de la moitié de l’acier mondial) de 2 à 3%, la production indienne de 7%, la production d’Europe de l’Ouest de 3%, notamment en France et en Italie, et enfin la production des Etats-Unis de 2%.

. Le secteur de l’énergie est, quant à lui, marqué par l’accord de plafonnement de la production de l’Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP) et de ses partenaires, dont la Russie, premier producteur mondial, prolongé de 9 mois jusqu’en décembre 2018. L’objectif de cet accord est de réduire les stocks à leur moyenne sur 5 ans, en réduisant la production de 1,8 million de barils par jour, soit environ 2% de la production mondiale. Un secteur qui note également une situation de reprise au Canada et aux Etats-Unis en ligne avec l’accroissement de leur production et des prix.

. Le secteur de la construction démontre également une amélioration. En 2017, l’activité immobilière a notamment profité de la hausse des revenus des ménages et de taux d’intérêt bas. Ceci est particulièrement vrai en Europe où les entreprises démontrent une certaine solidité à l’image de la baisse en cours des défaillances. En France notamment, le secteur enregistre une nette reprise grâce à la demande de construction de logements soutenue par des aides publiques, la reprise de la confiance des ménages et des taux d’intérêt bas. Alors que les risques subsistent au Royaume-Uni subissant les incertitudes liées aux négociations en cours sur le Brexit, ainsi que dans les pays émergents, comme en Chine, au Brésil ou au Moyen-Orient.

. Enfin, le secteur de l’automobile se démarque par des situations très hétérogènes au niveau mondial. Si les marchés européens, à l’exception du Royaume-Uni (toujours en raison des incertitudes liées au Brexit) sont plutôt dynamiques, le marché américain quant à lui ralentit, comme le marché chinois même si ce dernier est largement subventionné par l’Etat.

Sources : COFACE

« L’embellie se poursuit mais attention aux risques de surchauffe pour les entreprises » – Janvier 2018

« Guide Coface – Risques pays et sectoriels 2018 » – Janvier 2018

« Carte des évaluations pays » – Janvier 2018

« Evaluations du risque sectoriel » – Janvier 2018